jeudi 8 octobre 2015

Doris Facciolo, "Légendes et sortilèges"

Bonjour,
aujourd'hui je vais parler d'un livre que j'ai lu et apprécié de Doris Facciolo et paru il y a quelques mois aux éditions Elenya : Légendes et sortilèges. C'est un recueil de sept nouvelles sur le thème de la magie et de la sorcellerie. D'ailleurs, ce nombre ne m'étonne même pas, vu la symbolique du chiffre 7 en magie... Les histoires sont issues de légendes locales recueillies dans des villes belges (Liège, Haccourt, Milmort et Hermee), mais c'est une chose qu'on apprend à la fin du livre. Ce qui est intéressant c'est que le passé, le présent et le futur se côtoient au fil des nouvelles. Le cadre est le même car les histoires ont lieu aux mêmes endroits parfois (ou bien ces endroits sont évoqués dans l'histoire), mais à des époques différentes. L'auteur démontre par ces nouvelles que les mœurs changent mais que l'étrange dérange toujours.  Les points de vues changent, mais bien souvent, ce sont des adolescents qui sont mis en scène dans l'histoire. C'est d'ailleurs pour cette raison que je recommande ce livre à un public adolescent ; toutefois, les adultes y trouveront leur compte également.

Le style de l'auteur est très bon et rend la lecture de ces légendes très agréable. Cela donne envie d'en savoir plus sur celles-ci. J'ai eu le grand plaisir de rencontrer l'auteur ce week end à l'occasion d'un salon des geeks auquel je me suis rendue, et j'y ai appris quelques petites choses intéressantes. Tout d'abord, j'ai découvert que Doris Facciolo est Belge et viens justement d'un des villages cité dans le livre. Certaines légendes lui étaient connus, quant à d'autres, comme celle du "chien noir", elle les a découvertes en poussant ses recherches. 

Un fait intéressant dans ce livre, les nouvelles font en moyenne une vingtaine de pages et la lecture de l'ensemble de celles-ci se fait en 2-3 heures environ. Mais, j'ai beaucoup de plaisir à les relire car je constate qu'il y a plusieurs niveaux de lecture. Et surtout j'aime les explications de l'auteur à la fin du livre au sujet de toutes les nouvelles, du coup cela donne envie de les relire, encore. 

Dans l'ensemble, les sept nouvelles m'ont plu, mais si je devais citer une nouvelle qui m'a le plus marquée, je parlerais "des fourmis dans les doigts" . C'est l'histoire d'une jeune albinos, séquestrée par son père, le roi de mars. Quelques jours avant son seizième anniversaire, elle s'enfuit de sa chambre dans laquelle elle fut enfermée depuis sa naissance afin de découvrir le royaume, le peuple et surtout ce qui effraie autant le roi pour en arriver à renier sa fille. Elle apprendra qu'il a peur d'elle et des pouvoirs qui lui ont été peut être transmis génétiquement. A la fin du livre, l'auteur explique que pour cette nouvelle, elle s'est inspirée de la croyance populaire qui voudrait que les pouvoirs des sorciers se transmettent de génération en génération.

Il y a également une autre nouvelle qui m'a celle-ci interpellée, voire dérangée, c'est "thérapie". C'est une histoire qui fait froid dans le dos ; quand un psychiatre devient l'objet de la thérapie, ce sont les rôles qui s'inversent. La nouvelle raconte ainsi l'histoire d'une jeune fille qui est enfermée dans un hôpital psychiatrique et suis une thérapie, car elle prétend que ses dessins sont magiques. Lors de cette thérapie, elle affirme qu'elle partira le lendemain. En parallèle, on suit l'enquête du psychiatre quelques jours plus tard, Apres la fugue de la jeune fille : il essaie de comprendre comment elle a pu s'échapper alors même que tout le monde soutient qu'elle n'a jamais existé. Sorcellerie de la part de la jeune fille ou pure produit d'imagination du psychiatre? A la fin du recueil, l'auteur se demande au sujet de cette nouvelle : 
"si les sorcières existaient vraiment, aujourd'hui, ne seraient-elles pas prises pour des folles?"

Vous l'aurez compris, ce recueil de nouvelles, je le conseille, il ne vous prendra pas longtemps de le lire et ne vous laissera pas indifférent. Pour ma part, le style de Doris Facciolo me plaisant beaucoup, je vais de mon côté tâcher de lire ses autres nouvelles. La suite dans une prochaine chronique? 

Pour finir, je remercie Doris Facciolo pour le temps qu'elle m'a consacré et sa dédicace, et Jimmy Rogon, l'illustrateur pour son magnifique dessin. 


mercredi 7 octobre 2015

Pierre Lemaitre, "Au revoir là-haut"

Bonjour,
aujourd'hui je vais parler d'un roman de Pierre Lemaitre, paru aux éditions "Albin Michel" : au revoir là-haut, qui a été un véritable coup de cœur. Pierre Lemaitre, précisons-le, a obtenu le prix Goncourt avec ce roman. C'est un roman historique, genre que j'affectionne tout particulièrement depuis quelques années, plus précisément depuis mon premier Ken Follett, Les piliers de la terre, mais cet auteur fera l'objet d'une prochaine chronique. Pour en revenir à Pierre Lemaitre, le titre du livre reprend les derniers mots qu'un soldat a adressé à sa femme en 1914 :
"je te donne rendez-vous au ciel où j'espère que Dieu nous réunira. Au revoir là-haut, ma chère épouse..." 

Si je devais faire un résumé en une phrase du contenu du livre, je dirais que l'histoire porte sur la condition de vie des soldats juste après la première guerre mondiale et sur la création des cimetières militaires. Mais, bien entendu, c'est un peu plus que tout cela...

L'histoire commence le 2 novembre 1918 dans les tranchées. Juste après avoir sauvé la vie d'un de ses camarades, Albert Maillard qui fut enterré vivant, Édouard Péricourt se prend un obus qui lui arrache la moitié du visage. Le livre raconte cette drôle de vie que vont mener les deux hommes, l'un gueule cassée et l'autre se sentant redevable et s'occupant donc de lui. La fin de la guerre arrive avec la démobilisation, et Édouard Péricourt, artiste incompris, ne veut pas retourner chez lui et veut donc faire croire avoir péri lors de la dernière attaque qui lui coûta son visage. Les deux hommes s'installent ensemble, mais le retour à la vie après guerre est cruel. Ces héros tant salués par les médias se retrouvent dans une misère totale, il n'y a plus de places pour eux dans la société, et ils se sentent obligés de se justifier. Albert Maillard enchaîne les petits boulots, pendant qu'Edouard Péricourt vit reclus dans la minuscule chambre que se partagent les deux hommes, jusqu'à sa rencontre avec une fillette de onze ans qui lui redonne goût à l'art. Il se met à créer des masques pour cacher sa béance sur son visage et décide de mettre en place une arnaque : créer et envoyer des catalogues de monuments aux morts pour les municipalités qui souhaitent les ériger à la mémoire des soldats tombés au front, et empocher l'argent. En parallèle, on raconte aussi de manière épique la construction des cimetières militaires.

Ce que je ne savais pas et que j'ai appris à la fin, c'est que l'auteur s'est basé, pour écrire son roman, sur un fait divers qui avait fait scandale à l'époque au sujet des cimetières militaires. L'arnaque des monuments aux morts est quant à elle purement fictive. Cela fait froid dans le dos, par exemple les corps qui ne sont pas placés au bon endroit, les pillages, les cercueils trop petits, etc. Je ne sais quelle est la part de vérité. Il faudrait que je cherche des articles d'époque, ça m'intéresse vraiment. Personnellement, je passe souvent devant le cimetière de Chalons et je ne le vois plus de la même façon, même s'il n'est pas question de ce cimetière-là, mais ça fait réfléchir quand même.

Bref, un sujet assez dur à aborder mais là où est tout le talent de l'auteur c'est dans son style : il utilise des tournures qui me plaisaient beaucoup. Il sait aborder un sujet grave avec une pointe d'humour, même si parfois c'était grinçant 
"Ceux qui pensaient que cette guerre finirait bientôt étaient tous morts depuis longtemps."
Par moment c'était aussi très poétique :
"Il est pris d'un malaise, son cœur s'effondre, sa raison s'éteint, il sombre."

Donc, un livre que je conseille vraiment de lire car il est vraiment très intéressant, aussi bien au niveau historique qu'au niveau stylistique. Je n'avais jamais lu de romans de Pierre Lemaitre, mais je suis à présent curieuse de les découvrir. Objet d'une future critique? C'est fort probable...